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Alcoolisme et culture du vin : cessons les amalgames

  • Photo du rédacteur: Charlotte FOUGERE
    Charlotte FOUGERE
  • 14 mai
  • 3 min de lecture
Alcoolisme et culture du vin : cessions les amalgames
@Calice Hospitality and Wines

Un discours de plus en plus radical sur l’alcool s’installe dans le débat public français. Porté par des intentions louables (prévenir les risques pour la santé, briser les tabous), il glisse trop souvent vers une confusion inquiétante : celle qui assimile toute consommation, même modérée, à une déviance. Dans ce climat, le vin n’échappe plus à la stigmatisation. Produits, pratiques et usages sont systématiquement mis sur le même plan, sans réelle nuance ou contextualisation.


L’émission C ce soir diffusée sur France 5 hier soir et présentée par Karim Rissouli, illustre parfaitement ce constat. Le débat, centré sur le rapport des femmes avec l'alcool, abordait un sujet essentiel. Mais il s’est transformé en charge unilatérale, où tous les intervenants tenaient un même discours : l’alcool - vin compris - serait une sorte de psychotrope banalisé, voire promu par une industrie toute-puissante.


Le vin y est présenté comme une échappatoire pour les femmes oppressées, une propagande insidieuse, un poison social. Aucune contradiction, aucun rappel structuré du rôle historique, culturel ou économique du vin en France. Aucune distinction entre les usages festifs, culturels, gastronomiques, et les conduites à risque. À force de brouiller tous les repères, on alimente un climat de méfiance généralisée. Et ce qui aurait pu être une réflexion utile devient un procès à charge.


Or, la France est le deuxième producteur mondial de vin, un pays dont certains de ses paysages viticoles sont inscrits à l’UNESCO, où des millions de visiteurs viennent chaque année découvrir nos terroirs, nos cépages, nos traditions. A ce titre, l’œnotourisme n’est pas une activité marginale : c’est un moteur de développement territorial, un vecteur d’emploi durable, un lien vivant entre agriculture, patrimoine, culture et hospitalité. Accuser le vin sans discernement revient à mépriser toute une filière qui s’engage pour la qualité, la transmission, la modération. Et à ignorer la réalité : la grande majorité des consommateurs en France (notamment ceux qui fréquentent les routes des vins) ne boivent ni pour fuir, ni pour s’enivrer, mais pour découvrir, comprendre, déguster.


Autre idée reçue entendue pendant l’émission : la loi Évin serait devenue trop permissive. C’est une contre-vérité. La France reste l’un des pays les plus stricts au monde en matière de communication sur les boissons alcoolisées. Les professionnels du vin le savent : parler de terroir, d’expérience sensorielle, ou même de plaisir gustatif est soumis à une régulation drastique. Le secteur s’autocensure en permanence. Loin de relâcher la pression, il subit encore des contraintes parfois absurdes.


Que France 5, chaîne du service public, relaie ce type de discours aussi univoque interroge. Si l'on s’inquiète, à juste titre, des ravages de l’alcoolisme, on peut aussi attendre d’un média national qu’il valorise avec autant d’attention le travail des vignerons, les efforts des territoires, et les initiatives engagées pour une consommation raisonnée. Informer, ce n’est pas simplifier. C’est éclairer la complexité. Nous sommes tout à fait partants pour travailler ensemble à ce projet.


Au quotidien, nous accompagnons les domaines et les destinations qui veulent bâtir un œnotourisme exigeant, durable, et porteur de sens. Nous croyons à la force de l’expérience, à l’éducation au goût, au respect du vivant. Le vin n’est pas un outil de fuite. C’est un levier de transmission, de lien social, de valorisation des savoir-faire.


Lutter contre les addictions est une nécessité. Mais le faire en niant les différences entre les usages, les produits et les intentions, c’est prendre le risque de désintégrer une culture, et de braquer ceux qui pourraient être les meilleurs alliés d’une pédagogie de la modération. Ce n’est pas en diabolisant le vin que l’on fera reculer l’alcoolisme. C’est en éduquant, en transmettant, en valorisant la modération comme culture commune. En opposant sans nuance santé publique et culture du vin, on affaiblit les deux combats. Car la lutte contre les addictions, pour être efficace, doit s’appuyer sur la compréhension des usages, pas sur leur stigmatisation aveugle.


Et si, au lieu de désigner des coupables, on construisait un discours public équilibré ? Et si l’œnotourisme devenait justement un espace de réconciliation, où l’on parle de plaisir, de mesure, de responsabilité ? C’est cette voie que nous défendons.


 
 
 

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